Agroécologie et agroforestation sont deux solutions de captation carbone

@ybernardi – Pixabay

Recréer des puits de carbone, les gérer et les pérenniser, c’est encore la meilleure façon de capter du CO2 massivement. Un secteur attire alors l’attention puisqu’il représente 10 à 12 % des émissions mondiales de GES : le monde agricole. Un domaine aux multiples facettes qui s’étend toujours avec les cultures géantes et les élevages intensifs. Entre surconsommation d’eau, mécanisation, surexploitation ou pollution des ressources géologiques, l’agriculture a d’abord besoin de se décarboner, pour devenir ensuite une activité source de solutions de contribution à la neutralité carbone.

Une transition vers des pratiques agricoles et de gestion du sol durables est nécessaire. Des modifications dans nos habitudes alimentaires peuvent aussi limiter les émissions de GES du secteur agricole. La demande en viande excessive provoque le développement d’élevage intensif producteurs de méthane, et les productions de fruits et légumes hors saison ont chamboulé tout le cycle de la terre. Les parcelles sont donc surexploitées et ne sont plus en mesure de capter du carbone. Pour rendre au sol cette fonction primordiale, des stratégies utiles permettraient au secteur agricole de devenir l’un des puits carbone artificiels les plus stables, durables et économiquement viables. 

L’agroécologie et l’agroforesterie, sont des méthodes douces qui constituent le socle de ce nouveau puits de carbone. La première adopte une nouvelle façon de produire pour favoriser les faibles émissions de CO2. L’agroforesterie est quant à elle, une symbiose arbre-culture, utile pour la fixation et le stockage du carbone des champs. En constituant des sols propres, ces méthodes visent à produire efficacement en désaturant l’atmosphère.  

Produire autrement pour décarboner un secteur  

L’agroécologie, contraction des termes Agriculture et Écologie, se penche sur la culture du vivant en favorisant la biodiversité. À échelle de l’exploitation ou en prenant en compte production, transport et consommation, l’agroécologie applique les principes de l’écologie de notre quotidien en préservant et s’appuyant sur les écosystèmes. Cette méthode de culture permettrait d’oublier l’agri-intensive pour passer à l’agri-durable en restant économiquement viable. Le but primordial de ce nouveau mode de production est la diminution des pressions environnementales, telles que les émissions de GES ou l’utilisation de produits toxiques. L’agroécologie dépend fortement de nos habitudes alimentaires. L’anti-gaspillage devient un rouage à part entière à ce modèle naissant de production.  

Plus que de stopper les méthodes de culture émettrices de CO2, l’agroécologie vise à reconcevoir les systèmes de production. Elle permet de préserver les ressources qui sont mises à disposition par la planète dont l’eau, et le sol. Les pratiques les plus répandues visent en plus à veiller au bien-être animal sans élevage intensif, à mener au Bio dans les assiettes ainsi qu’à la “Bioéconomie” (énergies renouvelables). C’est un cercle vertueux pour conserver le carbone des sols, favoriser la photosynthèse et aussi dépolluer. De plus, l’agroécologie vise à limiter les pertes de carbone en évitant de laisser les sols à nu (sans plantes), en restaurant la culture en jachère, ou encore en fertilisant le sol avec du composte.  

En mettant en œuvre ces nouvelles pratiques, les acteurs de l’agroécologie souhaitent avant tout limiter la pression atmosphérique de leur activité, que ce soit par leur travail de la terre ou par leurs infrastructures. Ce modèle n’est pas un bond en arrière qui découragerait le changement. Selon Matthieu CALAME (ingénieur agronome) dans son manifeste “Une agriculture pour le XXIème siècle”, le futur de l’agroécologie est d’approfondir les démarches et d’appliquer ces pratiques s’inspirant de l’Avant.

Le passage à cette agriculture durable doit aussi être pensé à l’échelle des départements, des régions ou simplement des villes. Commencer à petite échelle pour viser plus grand. Le cas par cas doit entrer en jeu en prenant en compte les sols, les ressources ou même le maillage économique autour de la parcelle.  

En 2015, le GIEC estimait à 24% la part des GES liée à l’utilisation des terres agricoles et forestières (IPCC 

Près de 50% de la population mondiale vit soit dans des villes de moins de 500 000 habitants, soit dans les zones rurales environnantes (ONU – FAO)  

Agroécologie et agroforesterie, même crédo  

L’agroforesterie consiste à intégrer les arbres dans la production agricole ; Apporter le modèle de la forêt dans des champs pérennes. En matière de puits carbone, l’agroforesterie applique les préceptes de photosynthèse ou de stockage dans les sols. Un véritable écosystème se construit à l’échelle de la parcelle qui stocke facilement les GES et se dépollue au fur et à mesure. Les racines des arbres vont plonger dans les nappes souterraines et favoriser l’alimentation minérale en surface. Un peu plus haut, le sol sera recouvert de biomasse stockant et fertilisant, en plus d’être à l’ombre. Au-delà d’une action multiple de stockage de GES, les arbres en bordure ou dans une parcelle, servent également à abriter insectes pollinisateurs ou animaux utiles à la biodiversité.  

L’agroforesterie est donc une nouvelle méthode super-verte pour aspirer le CO2. En plus de planter des arbres “tampon” qui aspirent et réservent le CO2 d’une parcelle, cette méthode permet aussi de diversifier la production sur les terres. En effet, les arbres sont source de fertilisant par leur biomasse, source de bois (pour le poêle à granulés par exemple) ou même source de fruits et de feuilles sèches. Miser sur l’agroforesterie pour un exploitant, c’est aussi diversifier ses sources de revenus sur le long terme. Ainsi, ce modèle gagnant-gagnant permet le captage, le stockage carbone en plus d’une exploitation durable et viable.  

L’agroforesterie, au même titre que l’agroécologie, est un formidable outil de préservation du vivant, qui lutte contre la dégradation progressive des milieux, tout en maintenant le stock carbone existant. Un véritable enjeu sachant que “depuis 1950, 70 % des haies ont disparu des bocages français et continuent de diminuer. L’objectif de la France est la plantation de 7 000 km de haies et d’arbres intra parcellaires sur la période 2021-2022” (Source. Ministère de l’Économie et des Finances).  

4 pour 1000 : une action qui n’est plus entre quatre murs  

Lancé durant les accords de Paris de 2015 (COP 21), l’initiative “4‰” (4 pour 1000) vise à préserver les sols pour le climat. Plusieurs points sont au cœur du projet, telle que la baisse annuelle du CO2 dans les sols (en lien avec l’objectif “neutralité carbone” de la France). Elle tire son nom de la volonté d’augmenter chaque année la capacité de stockage de carbone des sols agricoles de 0,4 % (ou 4 pour 1000) dans les 40 premiers centimètres du sol. Ce qui serait équivalent à l’augmentation des émissions carbone anthropiques annuelles.  

D’après l’INRAE, “l’accumulation de carbone dans les sols se poursuivrait 20 à 30 ans après la mise en place des bonnes pratiques, si celles-ci sont maintenues”