Environnement Recycling : Pionnier du recyclage des D3E en France
Réduction des émissions

Environnement Recycling : Pionnier du recyclage des D3E en France

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Nous sommes le 3 Mai 2021. Le Capitaine Carbone arrive dans l’Écopôle de la ZAC de Maupertuis en lisière de Montluçon (03). Au beau milieu d’un espace vert, des centaines de personnes s’activent ici pour récolter, trier, broyer et valoriser des déchets ménagers provenant du grand centre de la France. Le Capitaine rencontre Jérôme Auclair, Directeur général du Groupe Environnement Recycling spécialisé dans le traitement et la valorisation des déchets dits « DEEE » (Déchet d’équipement électrique et électronique).

Le recyclage en France, quelle histoire !

Avant de vous immerger au cœur de cette belle entreprise, un peu d’histoire ne fera pas de mal. En 2003, bien avant la directive DEEE d’Août 2005, Jérôme Auclair et Emmanuel Petit décident de créer Environnement Recycling à Montluçon. À l’époque, la France enfouissait encore ses déchets en toute impunité, sans se préoccuper vraiment de l’impact écologique. Pour eux en revanche, c’était devenu inconcevable et il fallait agir vite. Rappelons néanmoins que le principe de recyclage des déchets ménagers ne date ni d’hier ni de 2003. Il remonte précisément au XVIe siècle et nous le devons à François 1er, le premier qui s’est penché sur l’insalubrité urbaine et qui a démocratisé l’emploi de paniers pour récupérer les déchets ménagers. Pour la petite histoire, il faudra attendre l’année 1884 pour que le Préfet de la Seine, Eugène Poubelle, imposa l’usage d’un récipient à ordures d’immeuble et inventa la célèbre poubelle.

Plus proche de nous, c’est la loi du 15 juillet 1975 qui a servi de socle à toutes les bases de réglementations à venir de l’hexagone. C’est elle qui a responsabilisé les collectivités locales au transport et au traitement des déchets ménagers dans des conditions évitant « tout risque pour l’environnement et pour la santé humaine ».
C’est aussi elle qui a instauré le principe du Pollueur-Payeur, qui a imposé une éco-taxe aux ménages français et qui a fixé les grandes lignes de la collecte sélective de sorte à « faciliter la récupération des matériaux, éléments ou formes d’énergie réutilisables ».

Environnement Recycling est une entreprise née en 2003, année du dernier vol de l’avion supersonique Concorde entre Paris et Toulouse. Cette entreprise revendique très vite son ADN particulièrement tourné vers l’économie sociale et solidaire, une démarche parfaitement cohérente avec un métier lié à l’environnement ceci dit. Dans cette filière, jaillit tout d’abord la société EVE, un tremplin qui facilite l’insertion d’un public éloigné du marché de l’emploi. Eve reste aujourd’hui la plus importante entreprise d’insertion de la région AURA. Un peu plus tard, la société Recyclea vient compléter ce cercle vertueux et consolidant le circuit-court de l’industrie, puisque ces trois entités sont situées sur le même site. Cette dernière société emploie 80% de personnes en situation de handicap.

© Adobe Stock – Par Kiattisak


Mais les DEEE, c’est quoi exactement ?

Dénommés aussi « D3E », ce sont les déchets d’équipements électriques et électroniques, précise Jérôme. En gros tout ce qui fonctionne avec une prise, une pile ou une batterie. 

Ces déchets sont regroupés en quatre grandes familles : 
– Les appareils appelés “GEM-F” : gros électroménager froid (climatiseurs, réfrigérateurs, congélateurs)
– Les appareils appelés “GEM-HF” : gros électroménager hors-froid (machines à laver, sèche-linge, lave-linge)
– Les écrans (plats ou cathodiques)
– Les Petits Appareils Ménagers (PAM) : fers à repasser, perceuses, ordinateurs, imprimantes, etc.

Sur le site de Montluçon, ils réceptionnent ces quatre catégories de DEEE à partir de 500 points de collecte répartis sur le grand centre de la France, mais ne traitent que deux d’entre-elles : les écrans et les PAM. Leur objectif performance environnementale est le suivant : transformer de la matière devenue secondaire (ou obsolète) en matière première !

Ils ont comme mission de collecter du déchet, de le dépolluer au sens de la réglementation (retirer les piles, les batteries, les tubes néons, les condensateurs ou encore les cartouches de toners) et d’obtenir une matière valorisable. L’étape suivante consiste à broyer et à séparer toutes les matières qui les composent (plastiques, ferrailles, métaux non ferreux, etc.), afin de les rendre les plus purs possible et leur offrir une deuxième vie en les réinjectant dans l’industrie en tant que matières premières.

Pour aller plus loin dans la valorisation, une partie du matériel informatique est testé et reconditionné pour se voir offrir une seconde vie la marque monpcpascher.com

Un taux de valorisation de 79,32% des petits appareils en mélange : et PAM !

Environnement Recycling en a fait un de ses chevaux de bataille, le traitement de A à Z des produits PAM. Réduits à un niveau élevé de pureté, ces produits transformés retrouvent une seconde jeunesse à l’état le plus primaire qu’il soit, limitant ainsi considérablement la quantité de déchets ultimes initialement condamnés à l’enfouissement ou à l’incinération. Parmi ces déchets, les plastiques restent indiscutablement la matière la plus complexe à traiter. C’est d’ailleurs ce qui a motivé la direction de l’usine à créer un laboratoire R&D pour analyser et séparer les différents profils de plastiques.

L’informatique représente également un parc important de produits à recycler au sein du groupe Environnement Recycling. Près de 75% du parc sont revalorisés. Une fois cette opération effectuée, une autre société du groupe se charge de reconditionner les produits : il s’agit de Recyclea. Les 25% restants sont soit obsolètes techniquement, soit économiquement. Ils suivent alors la filière de traitement pour revaloriser les matières qui les composent. Par extension, on peut considérer que les 75% d’appareils informatiques réutilisés symbolisent une action de réduction de gaz à effet de serre à grande échelle, car ne pas jeter et réutiliser, c’est réduire (règle fondamentale de l’anti-gaspillage). Les 25% restants s’apparentent quant à eux à une action de compensation, traitant tout ce qui n’a pu être réduit.

Bien que le secteur des déchets représente 3% des émissions de gaz à effet de serre en France, il faut souligner qu’une étude de la Fnade (Fédération nationale des activités de dépollution et de l’environnement) évalue à près de 40 millions de tonnes de CO2 les émissions évitées grâce à la gestion des déchets. De quoi « décarboner » l’image des recycleurs qui passent ainsi du statut d’émetteur de CO2 à compensateur, pouvant même revendiquer un solde négatif en dioxyde de carbone, toutes émissions réduites.

En 2017, la fermeture des frontières chinoises a déstabilisé les recycleurs français : fini pour eux l’importation de déchets étrangers, même triés. Il a donc fallu que l’Europe, et donc la France, s’organise et apprenne à cadrer ce secteur d’activité. La France s’est ainsi retrouvée avec énormément de déchets sur le dos et peu de moyens pour les traiter et les revaloriser, faute de transformateurs et dans l’attente de réglementation comme la loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire). Cela n’a pas empêché Environnement Recycling d’agir dans le bon sens dès sa création, alors que ce secteur n’était pas encore encadré. C’est cette loi néanmoins qui a contraint par exemple tous les donneurs d’ordre, publics ou privés, à s’équiper d’au moins 20% de matériel reconditionnés. De leur côté, les transformateurs plasturgistes vont avoir l’obligation d’utiliser 20% de matières recyclées. Il revient aux recycleurs de s’adapter cependant à leurs contraintes spécifiques et à leurs exigences, afin de satisfaire une quantité d’approvisionnement minimum, quitte à investir de façon importante et régulière, ce que ne manque pas de faire Jérôme Auclair.

En partant d’une page blanche, Environnement Recycling s’est progressivement inscrit comme acteur-clé du recyclage en France. Aujourd’hui, cette entreprise emploie 330 employés avec une évolution permanente du métier. “Lorsque l’on ne part de rien, forcément, tout est à créer, notamment les technologies et les réglementations, devenues de plus en plus contraignantes pour tous, mais pour le bien de tous, souligne Jérôme. “À peine avons-nous fini de nous adapter à une réglementation ou une nouvelle norme, qu’une autre arrive“, se confie Kévin Reignier, Responsable Process et Méthode chez Environnement Recycling. Ce métier est donc constamment contraint à évoluer pour participer à la propreté de notre planète et à la lutte contre le changement climatique.

“Jusque-là nous étions recycleurs, souligne Jérôme. On broyait et on séparait des matières. Aujourd’hui, on recherche autre chose, nous souhaitons aller plus loin, d’où l’embauche d’une Directrice R&D pour notre laboratoire « matières » et la création d’un laboratoire d’analyses en interne. Objectifs : fournir de la matière « propre » aux transformateurs et leur garantir un stock régulier.”

Image de Sigmund-aI4RJ-Mw4 sur Unsplash

Visite de l’usine

Elle débute par le trajet du camion qui arrive pour les approvisionner en déchets. Après la pesée obligatoire sur le pont à bascule, les déchets PAM vont suivre un parcours endiablé réparti en six phases, allant grossièrement de la dépollution au broyage, puis à l’affinage, en passant par des opérations de picking (tri manuel), jusqu’à la valorisation des produits en gisements, c’est-à-dire la transformation d’un produit par de multiples opérations manuelles, mécaniques ou optiques. Environnement Recycling a recyclé 69,4% de PAM en 2020 pour un objectif de 63% et en a valorisé 79,32% pour un objectif de 78%. Concernant les écrans plats, leur taux de recyclage a été de 70,32% pour un objectif de 70% avec un taux de 82,07% de valorisation.

Pour le « blanc » (lave-linge, lave-vaisselle, frigo, etc.), Environnement Recycling se limite néanmoins au tri, puis expédie les appareils vers les filières qui savent valoriser ce type de déchets, comme Terecoval dans les Alpes.

La première phase de dépollution des DEEE consiste à corriger les erreurs de tri des usagers, des déchèteries et autres points de collecte. Ces opérations se résument à rediriger les indésirables (DEEE mis dans la mauvaise catégorie) et enlevé les intrus (déchets qui ne sont pas des DEEE). Les PAM sont ensuite dépollués (enlèver des éléments potentiellement polluants comme les piles, batteries, condensateurs, tubes, néons et toners) avant d’être traités dans le process afin de parvenir au stade de matière première secondaire ou nouvelle matière première.

Le marché du recyclage œuvre par nature en faveur de la décarbonation

Le secteur du recyclage est le deuxième moteur des réductions d’émissions de GES, avec un coût d’abattement très variable selon les catégories de déchets, mais qui peut être faible, voire négatif. Le recyclage permet d’une part d’éviter l’utilisation de matières vierges et donc des ressources naturelles nécessaires à sa production. Il permet d’autre part de détourner un flux de déchets de la mise en décharge et de l’incinération et d’éviter ainsi les émissions de gaz à effet de serre. 

Particulièrement soumise à une règlementation stricte et en constante évolution, l’entreprise Environnement Recycling suit cet élan, certes, de plus en plus contraignant, mais aussi de plus en plus vertueux. Des certifications qualité encadrent le respect de ces règlementations. Depuis sa création en 2003 par exemple, Environnement Recycling est fortement engagée en faveur des enjeux sociaux et environnementaux. Elle les a élevés au rang de priorités et les décline au quotidien dans des politiques sanitaires, sociales et écologiques ambitieuses. Cet engagement lui vaut aujourd’hui d’être certifiée ISO 9001 (management de la Qualité), ISO 14001 (management Environnemental), ISO 45001 (management de la Santé et de la Sécurité au Travail) et d’être partenaire des éco-organismes. Un label européen fait aussi partie du cahier des charges d’Environnement Recycling et de tous les éco-organismes : le weeelabex. Ce dernier est parfois même plus exigeant que la règlementation standard.

Le mot de la fin

En amont au recylage, il y a bien sûr les consommateurs : 24% des consommateurs, qui ne représentent pas moins 9 millions de Français, n’ont toujours pas le réflexe de réparer (source Elabe). Pourtant, les réparations contribuent au prolongement de la durée de vie des produits et participent activement à la réduction des consommations de ressources et de la production de déchets. Néanmoins, selon l’ADEME, 97% des Français estiment que la réparation n’est pas facilitée par les fabricants. Pour 53%, réparer est plus coûteux que d’acheter. Enfin, 40% des pannes des produits électriques et électroniques donnent lieu à une réparation en France. Heureusement, grâce à la nouvelle Loi Anti-Gaspillage, un indice de réparabilité permettra bientôt au consommateur de savoir si son produit est réparable, difficilement réparable ou non réparable. Il aura donc le moyen d’agir à la source.

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